14.04.2010 - Eloge funèbre de Monsieur Jean-Paul PROUST

14 avril 2010

Eloge funèbre prononcée en l'Eglise Saint-Eustache


Mesdames et Messieurs,

Apprenant la disparition de Jean-Paul Proust, ce jeudi 8 avril, le prince souverain de Monaco s'est incliné devant la mémoire d'un homme « debout jusqu'au terme de sa route ».
Cette image qui paraît simple recouvre en réalité d'innombrables qualités.
Jean-Paul Proust était un très grand serviteur de l'Etat, au sens fort de ces termes. Il avait fait l'essentiel de sa carrière au ministère de l'Intérieur, largement représenté aujourd'hui pour lui rendre hommage.
Il avait occupé tous les postes de la hiérarchie territoriale, connu les arcanes de l'administration, de la direction générale de l'administration à la direction de la sécurité civile en passant par la direction générale des collectivités locales.

Préfet de région à 49 ans, puis directeur de cabinet du Ministre de l'intérieur, Jean-Pierre Chevènement, et préfet de police : sa carrière reste, bien sûr, emblématique pour tout le corps préfectoral.
Mais ce parcours ne doit rien au hasard. Jean-Paul Proust était investi dans tous les dossiers, dans  la conception des choses, mais aussi leur réalisation.
En 1989, on l'a vu se mobiliser totalement dans la reconstruction de la Guadeloupe, durant deux années, après le passage du typhon Hugo. Il avait été choisi pour cette tâche parce que les questions de sécurité civile l'avaient passionné, lui qui aimait le travail d'équipe, et les résultats concrets. Vingt ans plus tard, les témoignages d'estime affluent encore de la Guadeloupe et attestent du travail accompli.
On l'a vu ensuite partir pour Limoges et s'investir avec la même énergie : un article de La Montagne, le jour de son départ, le 14 novembre 1992, résume, là encore, son passage : « Regrets unanimes en Limousin… » Une semaine plus tard, à Rouen, il s'attaque sans tarder aux problèmes économiques de la Haute-Normandie, sur lesquels il organisera une consultation des habitants, en précurseur de la démocratie participative.

Lorsqu'il est nommé à Marseille en 1997, il se met à nouveau au service du développement de la région Provence-Alpes-Côte d'azur, au point de déclarer, lorsqu'il faut repartir : « J'avais acquis une passion pour Marseille et la région ».
Et cette fois-ci, c'est Jean-Pierre Chevènement qui l'appelle à ses côtés, pour diriger son cabinet : il ne pouvait pas ne pas occuper les plus hautes fonctions…
Les opinions étaient et restent unanimes : Jean-Paul Proust a réussi tout ce qu'il a entrepris, et il a n'a jamais cessé d'entreprendre. Avec cette voix de basse si singulière, il savait imposer son point de vue. Il savait même dire non aux puissants lorsqu'il l'estimait juste. Mais sa vertu cardinale était sans doute l'écoute des autres, tout autant que l'aptitude à se faire écouter. Le dialogue avec les autres, quelle qu'aient été leurs convictions, était pour lui une règle absolue.

Les élus, de toutes opinions, avaient d'ailleurs bien compris que son affabilité légendaire n'était pas factice, qu'elle reflétait un vrai respect des autres, une perpétuelle ardeur à comprendre, pour pouvoir expliquer, pour pouvoir agir, pour pouvoir résoudre.
Tous ceux qui ont croisé Jean-Paul Proust -je m'en souviens moi-même fort bien- savaient aussi que cet humour, que ce sang-froid, tous deux indéfectibles, n'étaient rendus possibles que par une compétence jamais prise en défaut.

Préfet de police, il l'a prouvé amplement, en servant sous l'autorité de trois ministres, issus de familles politiques différentes, et à leur entière satisfaction. Il avait fait de la présence des effectifs sur le terrain un  véritable combat, mené sans relâche.
Il croyait en ses hommes et il croyait aux résultats. A la demande de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, il a d'ailleurs mis en place en 2002 les premiers indicateurs de résultats dans les commissariats.

Il appelait cela en souriant le « comstat » à la française, par référence à ce qu'il avait vu fonctionner lors d'une mission à New York et qui l'avait fasciné…
C'était donc un véritable modernisateur. Mais c'était aussi un décideur, qui prenait ses responsabilités. Il l'a prouvé en maintes circonstances difficiles, à l'image de la gestion extrêmement délicate de la manifestation parisienne de l'entre deux tours des élections présidentielles de 2002.
Ministre d'Etat de Monaco, choisi par le prince Rainier, confirmé par le prince Albert, il a laissé cette même forte impression d'un homme totalement engagé et  loyal, sachant appréhender toutes  les situations, encore une fois très différentes, grâce à ce talent si particulier de négociation.
Si je devais ajouter un mot un peu plus personnel, à l'égard de sa famille, de son épouse, Marie-Cécile, de ses enfants, Johana et David, je leur dirais avec beaucoup de sincérité, au nom de nous tous, notre tristesse.

Je leur dirais aussi la profonde admiration que nous garderons pour Jean-Paul Proust, qui était autant attaché aux choses de la vie qu'aux affaires de l'Etat. Il préférait sans doute sa maison de Belle Ile aux lambris parisiens, ce qui était une preuve – une preuve de plus- de  sa profonde authenticité.

Son parcours restera un véritable exemple pour tous ceux qui aiment et servent la République.