08.04.2010 - Clôture des Etats généraux de la sécurité à l'école

8 avril 2010

Intervention de M. Brice HORTEFEUX, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales - La Sorbonne


– Seul le prononcé fait foi –
Monsieur le ministre,
Monsieur le recteur,
Mesdames, Messieurs,

Je suis très heureux d’être parmi vous, aujourd’hui, alors que se clôturent ces Etats généraux de la sécurité à l’école. Je sais que mon emploi du temps m’oblige à intervenir au moment de la restitution de vos travaux, mais je voulais être présent, compte tenu de l’importance  même du thème que vous avez traité au cours de ces deux journées.

Je tiens vraiment à saluer cette initiative de Luc CHATEL qui a permis de réunir non seulement des enseignants, des personnels de direction ou de vie scolaire, mais aussi tous les partenaires de l’institution scolaire : les représentants de la police et de la gendarmerie, l’autorité judiciaire, des responsables associatifs, les principaux acteurs des politiques de la ville, de la jeunesse et de la famille ainsi que les collectivités territoriales.
Si nous agissons dans l’urgence et réagissons à chaud, c’est que, bien souvent, l’actualité l’exige. Mais il faut, aussi, savoir s’accorder le temps de la réflexion pour analyser, comprendre, se concerter et évaluer les actions entreprises et les initiatives engagées.

Pour aborder ces Etats généraux de la sécurité à l’école, vous avez proposé une méthode : « comprendre, prévenir, agir ». Identifier les problèmes à traiter, s’accorder sur un diagnostic, fixer des objectifs, décider des mesures à prendre et aller aux résultats pour en apprécier la pertinence, c’est aussi une démarche que pratiquent les policiers et les gendarmes. Elle est, me semble-t-il, tout à fait adaptée au thème qui vous réunit depuis hier, celui de la sécurité à l’école.

La sécurité à l’école, c’est bien évidemment la condition indispensable au bon apprentissage des connaissances et à la réussite scolaire. Lutter contre les différentes menaces qui pèsent sur cette sécurité, c’est l’affaire de chacun d’entre nous. C’est un défi majeur, devenu priorité gouvernementale, que nous avons à relever car, comme l’a déclaré le Président de la République à Gagny, le 18 mars 2009 : « la  violence scolaire touche à ce qu’une société a de plus précieux : sa jeunesse, son avenir ».
Même si nous sommes totalement déterminés dans l’action que nous menons contre l’insécurité, il ne faut verser ni dans la tentation de la négation du phénomène des violences à l’école, ni dans celui de son exagération. C’est pourquoi ces Etats généraux présentent un intérêt majeur.
 

I.    Il faut d’abord s’entendre sur ce que l’on qualifie de violences scolaires.

(1) L’un de vos ateliers était consacré à « la mesure de la violence » ; il faut, en effet, savoir ce qu’il importe de comptabiliser pour disposer d’un réel outil de pilotage permettant d’orienter l’action en fonction de la réalité des situations et de leur évolution.

Mes services travaillent avec ceux du ministère de l’Education nationale pour confronter les données disponibles et en dégager des tendances qui nous éclairent sur la nature et l’ampleur du phénomène et permettent, de ce fait, d’y faire face de façon plus efficace. Le terme de « violences », au pluriel, offre un spectre très large qui peut aller du simple manque de respect, que l’on qualifie communément d’incivilité, au meurtre. Il y a, aussi, des violences cachées, rentrées, silencieuses qui engendrent des souffrances tout aussi dévastatrices qu’une agression physique. Bien sûr, les services de police et de gendarmerie sont, quant à eux, plutôt portés à recenser les faits constitutifs d’infractions pénales.
(2) Mais si nos outils de mesure sont distincts, ils sont aussi complémentaires et le croisement des données qu’ils fournissent aboutit à des résultats assez concordants.

Nous avons, en effet, une analyse convergente sur bien des points et nous allons encore progresser dans la mise en œuvre d’un instrument de mesure pertinent de ces phénomènes. Nous y travaillons avec conviction.

II.    Pour mieux lutter contre ces violences qui empoisonnent la vie de nos enfants et de leurs enseignants, de nombreuses initiatives sont prises avec l’Education nationale.

(1) Police et gendarmerie sont engagées dans une action globale qui est menée au travers d’un partenariat noué, depuis plusieurs années, avec l’éducation nationale.

Nous n’avons qu’un but, au travers de cette étroite collaboration : faire baisser la délinquance tant au sein qu’aux abords des établissements scolaires.
Ce partenariat est né de nombreuses initiatives locales rendues nécessaires par une situation devenue trop préoccupante en certains endroits. Ces pratiques ont été, par la suite, institutionnalisées par le biais de décisions gouvernementales, de conventions et de protocoles afin de légitimer, d’harmoniser et de généraliser ces actions menées en commun contre la violence en milieu scolaire.
Le 23 septembre dernier, ce partenariat a, une nouvelle fois, été consolidé par la circulaire commune que j’ai signée avec Luc CHATEL pour renforcer la sécurité des établissements scolaires.
(2) En février dernier, nous avons dressé un premier bilan commun de la mise en œuvre des dispositions de cette circulaire.
Ainsi :

  •     des diagnostics de sécurité ont été réalisés pour les 184 établissements réputés les plus exposés aux risques d’intrusion et de violences ; ils seront achevés pour tous les établissements d’ici la fin de l’année scolaire en cours ;
  •     tous les collèges et lycées disposent désormais d’un correspondant « sécurité-écoles » clairement identifié qui contribue à fluidifier les relations et à améliorer la réactivité face aux évènements ;
  •     les équipes mobiles de sécurité (EMS), mises en place dans les différentes académies et pour partie composées d’anciens policiers ou d’anciens gendarmes, travaillent en parfaite complémentarité avec les services de police et de gendarmerie ;
  •     la sécurisation des abords des établissements a été intensifiée ; elle est organisée en partenariat avec les EMS et les polices municipales ;
  •     des « référents sûreté » (policiers et gendarmes) sont, dans tous les départements, à la disposition de l’Education nationale pour la réalisation des diagnostics de sûreté ;
  •     enfin, des formations sur les problématiques de sécurité et la gestion de crise sont proposées au personnel d’encadrement de l’Education nationale.

III.    Mais il est certain qu’il faut aller encore plus loin.

Du bon travail est accompli, c’est évident, mais il faut faire mieux, tout le monde en a bien conscience. Vous avez dégagé des pistes, au cours de ces Etats généraux ; c’était bien leur objectif que de proposer des réponses concrètes aux problèmes rencontrés. Je voudrais, moi, vous dire ce que j’ai déjà mis en œuvre, au-delà de ce que vous connaissez déjà, et ce que je souhaite développer rapidement.
Tout d’abord, le plan d’action des forces de police et de gendarmerie est articulé autour de trois thèmes :

  •     la sécurisation des établissements scolaires proprement dite, à travers les mesures que je viens d’évoquer ;
  •     la lutte contre le deal de proximité ;
  •     et la lutte contre le phénomène de bandes.

(1) En effet, sachez que les abords des établissements scolaires constituent l’une des premières priorités du plan de lutte contre les stupéfiants

que j’ai lancé ces derniers mois. Bien évidemment, je ne vais pas vous détailler, ici, le contenu de ces plans, mais je peux vous indiquer que nous travaillons selon la logique des cercles concentriques, c'est-à-dire que s’agissant des établissements scolaires nous intervenons à l’intérieur dans le cadre de nos actions de prévention, mais nous nous intéressons aussi à ce qui se passe à leurs abords immédiats, ainsi qu’à leurs lointains et notamment aux lignes de transport en commun empruntées par les collégiens et les lycéens ou aux lieux qu’ils ont l’habitude de fréquenter.

(2) La lutte contre les violences scolaires bénéficiera aussi de notre plan contre les bandes violentes.

A cet égard, la loi anti-bandes du 2 mars renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public offre de nouveaux outils opérationnels contre les violences scolaires, avec notamment une aggravation des sanctions pour les auteurs d’atteintes volontaires aux membres du corps enseignant ou du personnel de soutien.
Cette loi correctionnalise, par exemple, l’infraction d’intrusion injustifiée dans un établissement scolaire. En outre, le fait de pénétrer ou de se maintenir dans un établissement scolaire en étant porteur d’une arme est désormais constitutif d’un délit spécifique. J’ai donné instruction aux préfets de veiller à la pleine application de ces dispositions.

(3) Enfin, d’ores et déjà, je vous propose que nous puissions systématiser les formations, avant leur prise de fonction, des personnels dirigeants et d’encadrement, dispensées par la police et la gendarmerie, aux problématiques de sécurité et à la gestion de crises.

Ce combat pour la sécurité à l’école nous concerne tous. La composition de cet auditoire en est la preuve. Nous sommes confrontés à un vrai problème de société dont le traitement nécessite une prise de conscience générale et une mobilisation de chacun, à commencer par les parents eux-mêmes.

Nous sommes à votre écoute, nous avons besoin des avis, des idées, des projets de chacun pour inventer des solutions pratiques, pragmatiques et innovantes. Aucun lycée, aucun collège ne doit être négligé. Je vous le dis : je mettrai tout en œuvre pour que nos établissements scolaires restent, pour chacun de nos enfants, des lieux de transmission des savoirs et d’apprentissage des valeurs républicaines. Assurer la sécurité, c’est prévenir, dissuader et réprimer. C’est aussi expliquer, car on ne respecte véritablement que les règles que l’on connait et que l’on comprend.