25.03.2008 - Présentation de l'avant-projet de loi de programme pour le développement économique et la promotion de l'excellence outre-mer

25 mars 2008

Intervention de Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'Outre-mer et des collectivités territoriales, lors de la présentation de l'avant-projet de loi de programme pour le développement économique et la promotion de l'excellence outre-mer, au Conseil Economique et Social


Monsieur le Président,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi tout d'abord de vous exprimer le plaisir de me retrouver au Conseil économique et social et de saluer le président Dermagne.

Permettez-moi ensuite de saluer le travail effectué par la section des économies régionales et aménagement du territoire présidée par M. Ghigonis et de remercier particulièrement M. Saubert, chargé du rapport sur cet avant-projet de loi.

Vous le rappelez, Monsieur le rapporteur, le CES a déjà eu l'occasion plusieurs fois de rendre des avis de référence dans le domaine de l'outre-mer, notamment en 2006 sur l'évolution de la LOPOM.

L'avant-projet de loi pour le développement économique et la promotion de l'excellente outre-mer que nous avons soumis à votre avis, avec Yves Jego, reprend d'ailleurs plusieurs recommandations du Conseil économique et social.

Votre avis, Monsieur Saubert, contient de nombreuses questions et suggestions. J'y reviendrai au fur et à mesure après avoir rappelé les principes fondateurs de ce projet de loi.

Yves Jego vous apportera, tout à l'heure, les compléments d'information pour les débats qui vont se dérouler cet après-midi et auxquels, malheureusement, je ne pourrai assister entièrement.

Le projet de loi de programme pour l'Outre-Mer défend une approche nouvelle du développement économique de l'Outre-mer et de ses entreprises. Il exprime de grandes ambitions.

Je crois à l'ouverture de nos collectivités ultramarines à l'environnement régional et à l'économie mondiale. Je crois à la compétitivité des entreprises d'Outre-mer.

Je crois en un développement fondé non pas sur l'assistanat, mais sur l'excellence.

C'est le fondement de ce texte. Je souhaite donner les conditions du dynamisme à l'Outre-Mer (1). Cette démarche est en effet une étape indispensable dans le nouveau modèle de développement économique que je propose (2).

1. Le projet de loi privilégie les conditions du dynamisme.

Il n'y a pas de dynamisme sans perspectives, ni adaptabilité.

Les entreprises et les populations d'outre-mer ont besoin de visibilité. La durée nécessaire ne doit pas nous empêcher de corriger les dysfonctionnements.

A) Les entreprises d'outre-Mer ont besoin de règles durables et adaptées aux spécificités de chacun des territoires.

- Elles doivent être durables, parce que les entreprises ont besoin de stabilité et de visibilité.

Le projet de loi s'inscrit donc en cohérence avec les échéances de la loi de 2003 qu'il complète.

- Elles doivent être adaptées aux spécificités de chacun des territoires.

Chaque département et collectivité d'Outre-Mer a des atouts différents. L'uniformisation n'est pas une solution.

C'est pourquoi a été ouvert un large champ à la concertation avec les acteurs économiques locaux, pour déterminer les urgences et les priorités.

Les préfets ont, à ma demande, animé cette concertation sur le terrain avec toutes les forces vives.

Pour la première fois dans une loi de programme, les singularités des territoires seront réellement prises en compte.

B) L'adaptation, c'est aussi pouvoir corriger les effets négatifs ou pervers des dispositions antérieures.

Certaines mesures d'allègement fiscal prévues par la LOPOM de 2003 devaient être réaménagées pour atteindre leur finalité.

Les exonérations de charges sociales seront recentrées sur les bas salaires.

La TVA non perçue récupérable sera concentrée sur les investissements productifs.

Pour le logement social, le dispositif de défiscalisation des logements du secteur libre avait conduit à un effet pervers, sur le prix du foncier. Il sera réorienté vers un mécanisme de défiscalisation des logements sociaux.

Monsieur Saubert, vous avez soulevé des questions pertinentes sur ces corrections.

Que les choses soient claires : mon objectif, comme celui d'Yves Jego, est d'obtenir un projet de loi efficace pour les économies d'outre-mer. Nous sommes attentifs à vos remarques, comme à celles formulées par les socio-professionnels.

J'ai d'ores et déjà fait organiser une réunion sur les modes de calcul des économies fiscales et budgétaires, et sur les nouveaux engagements financiers de l'Etat, puisque l'Etat a décidé d'augmenter en net ses concours de 100 millions d'euros par an. Cette démarche de transparence est indispensable.

Sur le fond des propositions, nous sommes disposés aux modifications dès lors que sera respecté notre engagement en faveur d'une approche neuve du développement économique.

2. Mon ambition est de passer d'une logique d'assistance à une logique de développement endogène.

C'est vrai pour les zones franches globales d'activités.

C'est vrai aussi pour le choix du développement humain.

A) Notre action doit porter en priorité sur des secteurs ciblés.

Les zones franches globales d'activités au profit des secteurs ciblés doivent valoriser les secteurs les plus porteurs dans le contexte mondial.

Le dispositif s'ajoute aux secteurs déjà bénéficiaires des mesures de défiscalisation.

Dans cette approche, les secteurs concernés par les zones franches doivent être peu nombreux et véritablement sélectifs.

Leur choix a été effectué en accord avec les partenaires locaux dans chacun des DOM.

Je me félicite des résultats de cette démarche, même si, je le sais, il y a, ici et là, des motifs d'insatisfaction ; je pense notamment à l'agro-nutrition à la Réunion. C'est un sujet sur lequel Yves Jego s'exprimera lors de son prochain déplacement.

Comme vous l'avez constaté, Monsieur le rapporteur, le projet de loi permet au secteur de la recherche et développement de profiter de la défiscalisation.

C'est pour moi une priorité, en corrigeant ainsi une erreur de la loi de 2003 et, je le note au passage, en reprenant une proposition du Conseil économique et social.

Le projet de loi reprend également une autre piste soutenue par le Conseil : à savoir le soutien aux intrants et aux extrants. Ce soutien était attendu depuis longtemps par les professionnels. Je suis donc particulièrement satisfaite de son intégration dans le projet de loi.

Dans cette démarche où les propositions du CES, les espoirs des professionnels et la volonté du gouvernement se rencontrent sur de nombreux points, il y a quand même certains désaccords. Dans votre rapport, vous évoquez certaines modalités des mesures proposées en matière de rénovation hôtelières ou l'absence du commerce de proximité.

Je voudrais vous faire part précisément de mon analyse.

Je connais les difficultés spécifiques du petit commerce, dans certaines parties de la Réunion ou de la Guadeloupe par exemple. Je connais aussi le rôle "social" de ces établissements mais, clairement, ces problèmes doivent être traités autrement que dans un projet de loi visant à renforcer la compétitivité des entreprises d'outre-mer.

A mélanger les objectifs, on nuit à l'efficacité : je ne le souhaite pas.

B) Il n'y a pas de développement économique sans développement humain.

L'Outre-Mer, on ne le dit jamais assez, est d'abord riche de ses hommes, de ses femmes et de sa jeunesse.

Cette complémentarité entre le développement économique et le développement humain explique l'importance que j'attache à plusieurs mesures du projet.

Le logement social tout d'abord. Le logement social n'est pas l'ennemi du logement libre, qui a largement bénéficié des mesures depuis plusieurs années et créé des emplois. Mais, je le dis sans ambages, la situation du logement social est souvent indigne.

Je ne peux l'admettre. C'est à nous gouvernement, c'est avec les collectivités sociales de prendre les mesures nécessaires pour développer l'offre foncière, pour construire, pour réhabiliter.

- La formation ensuite. Elle fera l'objet d'un effort particulier. Dans les zones franches, les employeurs auront à investir dans la formation professionnelle en contrepartie des exonérations fiscales qui leur seront accordées. Cela correspond, Monsieur le Rapporteur, à votre souci de voir toute aide assortie d'une obligation de résultats et d'engagements.

De même, les étudiants d'Outre-Mer doivent pouvoir étudier dans les universités en métropole.

Les étudiants d'origine ultramarine et résidant en métropole doivent accéder au logement dans les mêmes conditions que les étudiants de métropole. L'accès au prêt immobilier sera facilité pour les jeunes d'outre-mer résidant en métropole.

C) Le développement de l'Outre-Mer passera enfin par des mesures très concrètes pour améliorer la vie quotidienne des Français d'Outre-Mer.

- Je pense à l'amélioration des infrastructures. Un fonds exceptionnel d'investissement permettra de financer les projets d'équipements structurants. Il profitera à l'économie et aux citoyens.

- Je pense aussi à la garantie de la continuité territoriale pour les citoyens d'outre-mer.

L'augmentation des tarifs aériens freine le déplacement vers la métropole, et au sein d'un même territoire.

Le projet de loi propose la création d'un fonds unique de continuité territoriale, géré et partiellement financé par les régions, qui regroupera le passeport mobilité et la dotation de continuité territoriale.

Il concernera les déplacements vers la métropole, mais aussi, innovation du projet de loi, les déplacements à l'intérieur d'une même zone géographique. L'extension du champ de la continuité territoriale est conforme à l'avis que vous avez formulé en 2003. Elle était attendue.

La continuité territoriale est aussi remise en cause par la fracture numérique, qui marginalise certaines populations d'outre-mer. C'est pourquoi les liaisons par câble doivent être favorisées. Elles permettront l'accès généralisé à un haut débit fiable, performant et à meilleur prix.

Mesdames et Messieurs,

Ce projet de loi de programme vise à favoriser une croissance dynamique, fondée sur l'ouverture et l'excellence. C'est un projet pour la compétitivité des économies d'outre-mer.

Ce projet ambitieux sera atteint avec le concours de tous, à commencer par les entreprises. Je l'ai dit et je le répète : l'état actuel du projet de loi n'est pas définitif et son contenu, dans l'équilibre général qui est le sien, peut être amélioré.

Ce projet, vous l'avez compris, vise aussi à améliorer la vie quotidienne de nos compatriotes d'outre-mer, en agissant sur des réalités très concrètes : le logement, la formation, l'emploi, les transports.

Notre action doit être globale.

Il nous appartient de garantir à l'outre-mer un avenir de croissance économique et de cohésion sociale. Telle est l'ambition du projet de loi que le Gouvernement a soumis à votre examen.

Je vous remercie.